J’ai eu l’occasion de visiter les 2 nouvelles expositions temporaires du Musée d’Art Contemporain de Lyon (le MAC pour les initiés). Et c’était vraiment bien.
J’avais rendez-vous à 11h devant l’entrée du musée et comme je suis arrivée en avance, j’ai pu faire un tour de la Cité Internationale, bâtiment emblématique de Renzo Piano que je n’avais jamais vraiment pris le temps de visiter.
Une fois dans le Musée, j’ai pu profiter d’une visite commentée par une médiatrice du musée qui nous a présenté l’exposition “Collection”, qui rassemble une quarantaine d’œuvres du fond du musée, ainsi que “Antidote” d’Adel Abdessemed.
Alors effectivement, l’art contemporain ce n’est pas toujours compréhensible, il faut bien souvent connaitre l’artiste pour comprendre une œuvre. Mais a-t-on vraiment besoin de comprendre l’art pour l’aimer ? Moi non. J’ai apprécié de découvrir la façon de penser des artistes grâce à notre guide et j’ai adoré me laisser surprendre par des œuvres dont je ne connaissais rien, ni la raison d’être ni l’auteur.
Concerto for four piano – Arman
Ainsi l’œuvre d’Arman Concerto for four pianos m’a beaucoup plu : 4 pianos sont posés au sol, 1 est entier et les 3 autres sont découpés en morceau. Qu’a voulu dire l’artiste en nous montrant l’intérieur d’un piano ? Veut-il nous montrer la colère qui peut pousser à la destruction ? Veut-il qu’on se questionne sur le rapport entre l’extérieur et l’intérieur des choses ? Chacun peut voir ce qu’il veut dans cette œuvre.
Antidote
On est ensuite monté au 2ème étage pour l’exposition Antidote d’Adel Abdessemed, que l’artiste a voulue comme un village d’œuvres. Il s’agit d’une grande pièce où l’on peut découvrir plein d’œuvres en même temps. La scénographie m’a un peu perdue et je pense ne pas avoir accordé assez de temps à certaines œuvres. Adel Abdessemed a beaucoup travaillé sur la violence. J’ai surtout retenu Pigeons, un énorme dessin au fusain représentant un pigeon kamikaze.
Petite anecdote : Le titre de l’exposition Antidote vient du bar l’Antidote dans le 5ème arrondissement de Lyon, là où l’artiste a rencontré sa femme Julie. Il y a d’ailleurs une maquette de ce bar dans l’exposition.
Shams
L’œuvre la plus impressionnante est Shams, qui occupe tout le 3ème étage. Elle a été construite sur place durant 2 mois et sera détruite à la fin de l’exposition. C’est très impressionnant comme installation. On se sent immergé par toute cette argile rouge, il y en a de partout aussi bien sur les corps des ouvriers représentés que sur les chaussures ou les bouteilles posées au sol. « C’est le seul matériau qui peut donner ce côté canicule, transmettre la sueur, la fatigue. Parce qu’ici, il s’agit bien d’exploitation humaine. » cite l’artiste pour expliquer le choix de l’argile.
L’œuvre a été présentée pour la première fois au Quatar pour dénoncer les conditions de vie des ouvriers (souvent étrangers) sur les chantiers de construction pour la prochaine coupe du monde de foot. Moi cette œuvre m’a d’abord fait penser à la guerre des tranchées. Mais l’idée est la même : dénoncer la brutalité humaine.
Retour sur la polémique des poulets enflammés
Vous avez surement entendu parler de l’œuvre Printemps, elle a fait le bad buzz sur les réseaux sociaux. Retour sur cette affaire :
L’œuvre Printemps d’Adel Abdessemed était constituée de trois écrans projetant une vidéo où des poulets suspendus par les pattes à un mur en brique sont enflammés, et se débattent en brûlant vifs. En apparence, une séance de torture animale en gros plan.
En réalité l’artiste a utilisé un trucage : les flammes ne brûlent pas les poulets. L’artiste avait d’ailleurs déjà utilisé ce procédé sur lui-même. Évidemment l’artiste était au courant que les flammes n’allaient pas le brûler, mais curieusement les poulets eux n’avaient pas l’air d’être au courant…
Cette œuvre voulait rappeler la violence de l’événement qui a déclenché les printemps arabes en 2014 (Mohammed Bouazizi, un jeune vendeur ambulant, s’est immolé à Sidi Bouzid en Tunisie). Mais elle a tellement cristallisé les critiques sur la violence dans l’art, que l’artiste et le MAC ont retiré l’œuvre.
Mais ce retrait à lui aussi créé une polémique : l’art doit il se soumettre au jugement du public ? En France, la liberté d’expression est totale, or ici Adel Abdessemed s’est auto-censuré. Il voulait dénoncer la violence, créer une réaction mais cette réaction était si forte qu’il renonce…
La violence est une composante essentielle du travail d’Adel Abdessemed (dessin de pigeon avec de la dynamite sur le dos, cerfs à qui on aurait coupé les bois etc…), il savait ce qu’il faisait avec cette vidéo et devait savoir qu’il ne ferait pas l’unanimité.
Personnellement, j’avais prévu de ne pas aller voir cette œuvre (j’ignorais qu’elle avait été retirée), je ne voulais pas voir « ça ». Je ne pense pas qu’il faille montrer la violence pour la dénoncer. On peut penser à Yoko Ono et J. Lennon qui pour dénoncer la violence décident de rester dans un lit pendant des jours.
Néanmoins, chaque artiste a sa sensibilité et peut utiliser les moyens qu’il juge bons pour faire passer son message (dans les limites du droit bien sûr). Et chaque spectateur a le droit de choisir de voir ou ne pas voir certaines œuvres.
Bref j’ai beaucoup aimé cette visite au MAC, et j’espère vous avoir donné envie d’aller y faire un tour. Si vous y êtes allés, dites-moi quelle œuvre vous a le plus marqué en commentaire.
Infos :
Tarif :
– Tarif plein : 8€
– Tarif plein et visite guidée d’1h30 : 11€
– Tarif réduit : 4€ll
Exposition Collections & Antidote
du 9 mars au 8 juillet 2018
Musée d’art contemporain de Lyon
Cité Internationale, 81 quai Charles de Gaulle – 69006 Lyon
Ouverture du mercredi au dimanche, de 11h à 18h
Voir se site du MAC de Lyon