C’est affiché partout dans Lyon, vous n’avez pas pu le rater : la 16ème Biennale d’art contemporain de Lyon a ouvert ses portes la semaine dernière, et jusqu’à fin décembre. Pour cette nouvelle édition, le duo de commissaires d’exposition Sam Bardaouil et Till Fellrath a choisi comme thème « manifesto of fragility ». Si le thème a été décidé avant le Covid, la période trouble de la pandémie que nous avons traversée a fortement impacté son interprétation.
Pour eux, ainsi que pour les plus de 200 artistes invités, la fragilité n’est pas vue comme une faiblesse, mais au contraire comme un appel à la résistance, à la résilience. Il faut dire que de nombreuses œuvres ont été créées spécialement pour la Biennale, et certaines ont donc été conçues ou imaginées pendant les différents confinements.
© Studio Safar
Si la narration en 3 étapes de ce manifesto of fragility invite à commencer par le macLYON –on y trouve une exposition centrée sur une personne (Les nombreuses vies et morts de Louise Brunet), puis une autre centrée sur une ville (Beyrouth et les Golden Sixties), l’épicentre de la biennale se trouve cette année encore dans les anciennes usines Fagor à Gerland. C’est sur ce site industriel de près de 30 000m² que se trouve la majorité des artistes contemporains rassemblés autour du récit Un monde d’une promesse infinie qui aborde la fragilité de notre monde et une grande diversité de pratiques.
Au total, la Biennale se déploie sur 12 sites (6 payants, et 6 gratuits), dont l’Institut d’Art Contemporain à Villeurbanne et le très attendu Musée Guimet (dont les portes étaient closes depuis plus de 15 ans).
Plus de 200 artistes, donc, cela signifie des centaines d’œuvres. Ça va être compliqué de tout voir en détails, mais voici 5 œuvres à ne pas rater à cette 16ème Biennale de Lyon.
Grafted Memory System, de Ugo Schiavi, au Musée Guimet
Que l’on soit un ancien lyonnais qui a connu le Musée Guimet alors qu’il était ouvert, ou qu’on en ait seulement entendu parlé, tout le monde a hâte d’entrer dans ce monument iconique du 6ème arrondissement. Le parcours commence par des petites salles, voire des salles techniques. Et enfin, on y arrive, la grande salle avec la verrière. Le lieu est magistral, et l’œuvre monumentale d’Ugo Schiavi nous fait l’effet d’une claque. Imaginez une structure immense, sorte de mécano d’aquariums oubliés depuis des millénaires, remplis de fossiles et de plantes hors de contrôle, de câbles alimentant des écrans d’image 3D. Le tout agrémenté d’une bande son enveloppante qui renforce l’ambiance post apocalyptique. Qui a dit que la nature était fragile ?
© Anthony Nuguet
Maggic Cubes, de Adji Dieye, à l’Institut d’Art Contemporain de Villeurbanne
Direction Villeurbanne et l’IAC qui accueille la Jeune Création Internationale, le rendez-vous incontournable des artistes émergents. Peut-être connaissez-vous les studios photo ambulants qui voyageaient en Afrique de l’Ouest dans les années 60-70s ? Les gens venaient poser dans des décors colorés (même si les photos étaient souvent en noir et blanc) et de nombreuses expositions de ce style ont eu lieu. Adji Dieye s’en inspire ici pour créer de magnifique fausses photos publicitaires d’une fausse marque alimentaire européenne, symbole du soft power colonialiste. L’identité est bien fragile.
© Anthony Nuguet
Virgo, de Pedro Gómez-Egaña, aux anciennes usines Fagor
L’œuvre de Pedro Gómez-Egaña est à la fois attirante et perturbante. Il s’agit d’un décor de maison banal, mais l’installation découpée par tranche par ces cloisons nous perturbe et nous questionne. Comment habiter un tel lieu ? Cette maison pourtant bien accessoirisée ne serait finalement pas si confortable ? On y pénètre par une sorte de tunnel qui permet à la fois des perspectives rassurantes et des cassures dérangeantes. On ne sait plus trop dans quelle pièce on est. Par moment, l’installation devient le décor d’une performance, mue par des comédiens qui prennent possession de cette maison et en bougent certains éléments. Peut-être pour souligner la fragilité de l’habitat ?
© Anthony Nuguet
We were the last to stay, de Hans Op de Beeck, aux anciennes usines Fagor
Etrange sensation lorsque l’on pénètre dans ce grand hall des usines Fagor entièrement dédié à cette œuvre de Hans Op de Beeck créée in situ pour l’occasion. On y découvre un parc, ou plutôt un camping figé, entièrement peint en gris, qui n’est pas sans rappeler les catastrophes écologiques que l’on voit de plus en plus. Ici rien n’a brûlé, mais peut-être qu’un volcan a recouvert le lieu de cendres ? Le repas est encore sur la table, le linge sur le fil, et les chaussures devant la caravane, mais où sont les gens ? La vie est bien fragile.
© Anthony Nuguet
Paperwork and the Will of Capital, de Taryn Simon, aux anciennes usines Fagor
Au premier abord, on voit simplement des photos de fleurs. Il faut s’approcher un peu pour comprendre que ces bouquets sont des répliques exactes des centres de table utilisés lors de signatures de grands accords internationaux, des compositions créées pour l’occasion avec des fleurs venues de 4 coins du monde. Mais au final, que sont devenus ces accords ? Ont-ils été honorés ? La parole, même écrite, est finalement bien fragile.
© Anthony Nuguet
Manifesto of fragility, 16ème Biennale de Lyon
Du 14 septembre au 31 décembre 2022
?macLYON, Anciennes Usines Fagor, Musée Guimet,
Du mardi au vendredi de 11 h à 18 h
Samedi et dimanche de 11 h à 19 h
Nocturnes aux usines Fagor jusqu’à 22 h les vendredis 30 sept, 14 oct, 18 nov et 2 déc
?Institut d’Art Contemporain
Du mercredi au vendredi de 14 h à 18 h
Samedi et dimanche de 13 h à 19 h
Plein tarif : 20 € au guichet, 18 € en ligne
Tarif réduit : 12 € au guichet, 10 € en ligne
Tarif mobilité durable : 15 €
Nombreuses visites commentées (adultes, familles, brunch, apéro, etc…) et ateliers aux usines Fagor, au Musée Guimet et au macLYON.
Plus d’infos et programme complet sur le site internet de la biennale.