Depuis 5 ans, les petites portions à partager ont envahi les bars et restaurants changeant un peu la configuration des soirées.
Je me souviens encore d’un très vieil article sur ce même blog où je râlais sur les planches de mauvaises charcuts’ industrielles dans les bars. Je bénissais les pubs et leurs burgers-bière-frites et les petits bistrots bons marchés où on pouvait commander un pot de Côte et un saint Marcellin sans se sentir jugé par le patron.
A l’époque, je priais pour qu’il existe plus de lieux comme le sublime Bistrot du potager qui a été précurseur de cette tendance à Lyon.
Oui, les amis, je vous parle d’un temps – pas si lointain mais quand même – où on rêvait que les bars de Lyon servent à manger de bons plats à partager dans lesquels piocher.
Aujourd’hui, alors que tous nos bars à vin deviennent des “caves à manger” et nos restos des “lieux de vie et de partage” (pitié !), est-ce qu’on a envie de “partir sur un concept d’assiettes un peu chics à partager” ? – à lire avec le ton du serveur pédant qui pense avoir eu l’idée du siècle.
Quelle place reste-il au bon vieux restaurant et leurs menus Entrée+Plat+Dessert ?
Et surtout, peut-on encore aller boire un coup après le boulot sans débourser 40€ ?
Les tapassiettes
Sur Paris, on les appelle les Tapassiettes, ainsi baptisées il y a quelques années par le guide influenceur le Fooding. C’est mignon, mais je n’ai jamais entendu ce terme à Lyon. Il faut croire que le parisianisme s’arrête parfois aux portes de sa petite ceinture (pour notre plus grand plaisir) (c’était gratuit).
Tapassiette :
N. f. De tapas et assiette (2018). Plat, chaud ou froid, de format intermédiaire, servi en ribambelle dans ces restaurants contemporains où l’antagonisme entrée/plat est aboli. – Ne pas confondre avec tape-assiette, qui désigne celui ou celle qui ne peut s’empêcher de prélever un peu du plat de son commensal pour goûter.
Définition du fooding
Ces “tapas” qui n’ont absolument plus rien de “tapas”
Certains lecteurs nous l’ont fait très justement remarquer suite à notre article Top 5 bars des meilleurs bars à tapas de Lyon : on n’a pas du tout écrit un article sur les bars à tapas espagnol. Pour une bonne raison. On n’en trouve presque plus à Lyon. Des vrais, comme là bas, où on peut grignoter des petites bouchées individuelles à prix dérisoires sur un coin de comptoir.
Le tapa (oui, ça fait étrange au singulier) accompagne le verre de vin ou la sangria bon marché et s’attrape nonchalamment avec des doigts. Il est “bol de piments grillés” ou “patatas bravas”. Il est “crouton de pain à l’ail surmonté d’une tranchette de jambon ibérique”, il est “bouchée anchois-olive-mini-tomate”. Il est simple, sobre et ne pète pas plus haut que son cure-dent. Et au mieux, il est posé sur une petite serviette en papier du plus bel effet.
Le bar à tapas porte 2 notions importantes qui tendent à disparaître avec le concept de portions à partager : Il doit être partageable et il doit être bon marché.
Partageable ?
Qui n’a pas déjà vécu ce moment pénible, où l’on se retrouve face à un petit plat absolument impartageable sans avoir été prévenu.
Prenons l’œuf parfait par exemple. Expliquez moi comment on partage un œuf parfait ?
Idem pour le velouté de butternut et son UNIQUE chips de parmesan, la part de pâté croûte au foie gras (qui aura la chance de tomber sur le médaillon du dit foie gras?), la tartine que l’on passe de longues minutes à couper équitablement sans que l’intégralité de sa garniture ne se vautre dans l’assiette… Et enfin, la verrine de panna cotta avec ses 3 petites cuillères (absolument pas contexte sanitaire 2020/2022).
Je me trompe où on est en train de partager l’équivalent d’une entrée pour une personne… en quatre ? Ce qu’à l’évidence, on ne ferait pas dans une configuration “entrée plat dessert”. Même si on aime bien piocher dans l’assiette du voisin, généralement, on ne fait que goûter.
Bon marché ?
La carte affiche bien souvent des prix attrayants. Autour de 6, 7 € les portions. Moins cher qu’un plat donc. Et qui active inconsciemment la zone du cerveau qui donne envie de consommer plus (j’ai pas creusé, mais je suis sûre qu’elle existe cette zone).
Et évidemment, à l’instar des buffets roulants japonais, on est toujours étonné lors du passage en caisse de constater qu’on a explosé le budget resto… du mois.
D’ailleurs, à propos de budget, comment se comporter face à des amis qui ne consacrent pas du tout le même budget que sois aux sorties resto ? Comment éviter d’imposer ses propres envies tout en se faisant plaisir ?
Certains lieux proposent une carte aux prix assez variés, allant de l’assiette de frite maison à 5€, au plat plus travaillé et plus chiche autour de 16€. Ce qui permet de calmer les estomacs, tout en laissant la possibilité aux plus gourmands (et aux plus riches) de se faire un petit plaisir.
Le tout est de partager équitablement l’addition. Et à la fin, on se refait le sketch de Murielle Robin (réf de vieille) en pire.
Enfin, on a tendance à perdre nos repères. Les plats sont déstructurés, il n’y a pas de code comme dans une assiette de brasserie par exemple. On a la viande d’un côté, les légumes dans un autre plat et les féculents… dans la corbeille à pain. Difficile de s’y retrouver et de savoir si notre portion sera assez copieuse.
Et franchement, il n’y a rien de pire que de checker son frigo en rentrant du restaurant.
Créatifs
En restant objective, je dois dire qu’on a quand même de très belles adresses sur Lyon qui s’en sortent vraiment bien et qui jouent le jeu du partage.
Il faut admettre que le plat qui ne s’inscrit pas dans un menu, casse les codes et sort d’une certaine standardisation. Ce qui laisse beaucoup de liberté aux chefs. Les assiettes sont créatives, surprenantes et privilégient les produits de saison.
On voit se développer une inventivité anti-gaspi, avec le recyclage intelligent du service du midi plutôt standards, en portions du soir plus free-styles.
Quand les assiettes arrivent sur table toutes en même temps, c’est comme un joli ballet donnant cette impression de profusion (incroyablement instagrammable en plus).
Le point d’orgue de la soirée se trouve maintenant au centre de la table et non plus individuellement devant chaque convive. On se retrouve à analyser, décortiquer, humer pendant de longues minutes un seul et même tableau dans lequel on s’apprête à piocher, ensemble.
Alors ? On est pour ou on est contre ?
Sur le principe, se nourrir pendant qu’on torpille sirote notre verre de Viognier, c’est plutôt une bonne chose. L’after-work étant un des moments les plus attendus de la journée, il devient encore plus conviviale s’il est accompagné de bonnes choses à manger et à partager.
Mais on aimerait vraiment que les commerçants jouent le jeu.
On se retrouve trop souvent devant des plats de restaurant version miniature, à peine moins cher que sur une carte classique… et qui ne sont pas du tout étudiés pour être partagés. Ce qu’on veut, c’est de la bouchée, de la croquette, des tartines pré-découpées. On veut tremper dans des sauces et manger avec les doigts.
Ou sinon… et bien on va au restaurant.
Quelques conseils pour qu’un apéro de plats à partager se passe bien.
- Prendre un premier verre et se laisser le temps de voir défiler les plats des autres clients, évaluer leur taille, se donner envie.
- Privilégier les plats vraiment partageables, comme les frites ou les portions prédécoupées.
- Essayer de ne pas partager l’addition en part égale, mais payer ce qu’on consomme (plus facile à dire qu’à faire)
- Éviter de commander toute la carte tout de suite. Cela permet de déguster plus lentement, de faire durer le moment… et de manger chaud.
Adresses
Le triptyque qui illustre l’article est composé de 3 portions à partager parfaites à l’apéro :
- Les haricots cajun frits de l’Alerte Rouge – 4,90€ – Lyon 2ème
- Les Haricot coco alubion ultra fondant du Micro Sillon – 3€ – Lyon 1er
- La corbeille d’oignons frits et ketchup maison des 3 Chauves – 5€ – Lyon 7ème
1 commentaire
T aigri frère en plus on est champion de france