L’heure est grave.
Ça ne vous aura probablement pas échappé (on nous le rabâche assez), c’est la crise ! Et quand ils cherchent des sous par tous les moyens pour clore leur budget, sur quoi est-ce que les politiques rognent ? La culture, bien sûr !
Évidemment, je râlerais encore plus si on rognait sur la santé ou l’éducation (déjà que depuis quelques années les coupes sont de plus en plus franches), mais je reste persuadé que la culture est une valeur fondamentale de l’humanité. Elle porte en elle le ciment de l’unité entre les Hommes, ciment encore plus nécessaire par temps de crise où l’on a tendance au contraire à rester tourné sur soi-même, ou en tout cas sur sa communauté (au sens large : les étudiants, les anciens de son école ou de sa fac, les collègues de sa boîte, les fonctionnaires, etc…)
Les associations culturelles sont donc les premières touchées par la crise. Tous les prétextes sont bons pour ne pas renouveler ou diminuer les subventions.
Trop fort
Très souvent, le premier prétexte qui est donné, c’est celui du volume sonore. La première salve a été donnée l’année dernière au Rail Théâtre, un des deux lieux utilisés par l’association Grrrnd Zero pour faire ses concerts. Le quartier de Vaise s’étant fortement urbanisé dans les dernières années, les plaintes des riverains se sont multipliées, contraignant l’association a cessé ses concerts.
Même épée de Damoclès pour le Clacson à Oullins (la salle gérée depuis 30 ans par la MJC attenante) qui va se voir affublé d’un limiteur de bruit plafonné à 97dB (alors que la norme officielle est de 105dB). En effet, ce sont cette fois d’autres services de la municipalité logés dans les locaux que ceux du Clacson qui se sont plaint. Plus question dans ces conditions d’organiser des concerts de musiques amplifiées et surtout, plus question de résidences d’artistes comme c’est le cas aujourd’hui. Mais qui dit plus de résidences, dit moins de subventions des autres organisations culturelles, comme la DRAC, la région, etc… et donc à terme la mort de la salle.
Les normes
Du côté du Sonic, c’est cette fois la mise aux normes qui pose problème. A l’origine prévue comme un bar-restaurant, la péniche amarrée vers Perrache se voit imposées des normes plus drastiques (en plus d’un limiteur de bruit) maintenant qu’elle organise des (plutôt bons) concerts. Mais comment financer tout ça ?
Même problème de normes du côté de Grrrnd Zéro cette fois dans leur local de Gerland qui leur sert de lieu de répétition, de local administratif et de salle de concert. Les imbroglios entre le propriétaire et le gérant (respectivement le Grand Lyon et la ville de Lyon) ont menacés à plusieurs reprises l’association d’un arrêt pur et simple. Un accord précaire a été trouvé avec les services culturels de la mairie, mais il est bien mince et court sur seulement quelques mois. Que se passera-t-il ensuite ? Vous avez d’ailleurs peut-être vus fleurir des affiches en presqu’ile ce samedi, suite à une opération de comm qu’ils ont lancé.
Un choix politique
Et encore, je ne parle que des associations organisatrices de concerts car c’est le domaine que je connais le mieux, mais je suis sûr qu’on pourrait trouver de nombreux exemples dans d’autres domaines culturels.
Il faut savoir ce que l’on veut : développer les cultures au sens large, en soutenant toute sorte de créations diverses et variées, l’ouverture d’esprit, recréant ainsi du lien social, etc.. ou devenir une ville dortoir pour cadres ex-parisiens en mal de tranquillité. C’est le choix crucial que va devoir faire la ville de Lyon dans les années à venir.
En attendant, je ne peux que vous inviter à soutenir toutes cette association (plus d’autres) en allant sur leur page Facebook, en s’inscrivant à leur newsletter et surtout en participant aux manifestations qu’elles organisent.
Grrrnd Zero : site internet (je vous recommande leur newsletter)
Le Sonic : site internet, facebook
7 commentaires
Et bien, même qu’on est sérieux sur Lyon CityCrunch, je trouve ça bien 🙂
J’ai vraiment du mal à comprendre ces gens qui font fermer les lieux qui contribuent à l’identité et l’ambiance d’un quartier, alors que ce sont ces même identité et ambiance qui les ont fait se loger ici. O_o
Bravo Anthony pour l’article didactique.
Au fait, le Clacson fête ses 30 ans le weekend prochain. C’est l’occasion de profiter du bon son de la salle avant qu’il ne soit plafonné !
C’est sûr que c’est la crise. Dans les médias aussi d’ailleurs. Vous devriez peut-être donner les sources qui vous ont permis de réaliser cet article. Tribune de Lyon et Rue89 sans doute.
Et bien figure toi que non. La tres grosse majorité de mon article était écrite avant de lire l’article de Rue89 et je n’ai pas lu celui de la tribune de Lyon. Mais il n’y a aucun scoop ici pour ceux qui suivent cette actualité de près comme c’est mon cas.
@Grand Ours: Merci de qualifier notre humble blog collectif de médias. Parcours le site, tu constateras que la plupart de nos articles sont sourcés quand l’info est repris ailleurs. Si ce n’est pas le cas, et connaissant Anthony, c’est que l’info est connu de l’auteur.
Pas besoin de lire Rue89 et La Tribune de Lyon pour être au courant des difficultés que rencontrent ces salles. Les fréquenter régulièrement et suivre leur newsletter suffit.
Il me semble qu’on a plus souvent vu des “vrais” médias repomper des articles de blogueurs que l’inverse… Ce blog en fait d’ailleurs régulièrement les frais.
Voici le mail que j’ai envoyé la semaine dernière au Marie de Oullins, en soutien au Clacson.
Aucune réponse à ce jour et le discours est le même…
“M. le Maire,
Votre commune à la chance d’abriter une (la dernière ?) très belle salle de concert de taille intermédiaire, devenue au fil des décennies une référence nationale en terme de découvreur de talents et organisateur de concerts.
J’ai fêté mes 40 ans il y a peu et je suis musicien amateur depuis toujours (35 ans). Pas encore Lyonnais, je venais déjà trouver l’inspiration en ce lieu qui offre l’avantage évident de proposer des concerts de grande qualité en centre ville, permettant un accès facilité par les transports en commun ou l’autoroute. J’y ai vu, entendu, découvert parfois des groupes régionaux autant que nationaux ou internationaux dans des conditions d’accueil et d’écoute toujours excellentes et cela a contribué, pour un public innombrable au fil de ces années à donner à votre ville, Oullins, une image dynamique sur le plan culturel. En tant que spécialiste du patrimoine, vous savez mieux que personne, M. le Maire, que les (r)évolutions culturelles ne sont jamais venus des musées mais bien d’endroits comme celui-ci, qui permettent de tester de nouveaux styles musicaux, de découvrir des talents et de confirmer des genres.
J’ai aussi vu disparaître, au fil de ces 20 dernières années, une quantité innombrable de salles de spectacles de qualité sur l’ensemble de l’agglomération lyonnaise (au hasard pour les plus anciennes : Le Globe, le Pezner, le Bistroy, le Citron… et pour les plus récemment “tombées” sous le coup d’un microrupteur : le Rail Théâtre, le CCO, le Marché Gare et des associations organisatrices comme Grrrrrnd Zero…), au point qu’aujourd’hui, mis à part le Clacson d’Oullins et la MJC Ô Totem de Rillieux pour les salles subventionnées ; ou le Warm Audio de Décines et le Lyon’s Hall de Vaise pour les salles autonomes restent les seules alternatives aux grandes salles “officielles” pour découvrir ou voir des groupes dont ces dernières ne veulent pas dans leur circuit.
Tous ces endroits sont autant de possibilités pour des musiciens amateurs ou confirmés de rencontrer leur public, un public qui ne se retrouve pas dans l’offre des salles ou lieux de concerts subventionnés, n’a pas les moyens de s’offrir leurs places de concert et veut défendre une alternative à la musique “officielle”.
Aujourd’hui, votre municipalité menace de museler le Clacson par l’entremise d’un limiteur de son (à 97 dB alors que la loi autorise 105 dB !), dont toutes les salles qui en furent dotées ont fini par disparaître ne pouvant plus œuvrer dans de bonnes conditions ; et l’interdiction de travail à résidence, passage nécessaire pour tout musicien qui souhaite proposer un spectacle de qualité.
À l’heure où votre ville va encore être rapprochée de Lyon par le biais du métro A, je vous conjure, M. le Maire, à reconsidérer cette injonction, au risque d’être complice de la disparition de cette salle mythique et d’un nivellement par le bas de la culture musicale, au profit de grosses machines commerciales parisiennes qui proposent une bouillie indigeste faite de comédies musicales et de vieilles gloires passées en quête de recettes supplémentaires… dans lesquels nous sommes nombreux à ne pas nous reconnaître !
De plus, vous savez que cette offre ne se fait pas sur votre commune, qui ne propose pas de capacité d’accueil suffisante pour satisfaire l’appétit gargantuesque de ces “maisons”.
Au contraire, soyez le Maire qui a renforcé le dynamisme culturel de votre ville, par le soutien indéfectible à cette salle devenue pour beaucoup une institution, le Clacson, qui ne souhaite aujourd’hui comme hier rien d’autre que satisfaire son public tout en respectant ses voisins, ainsi qu’elle l’a toujours démontré.
Vous remerciant, M. le Maire, de l’attention que vous aurez portée à ce courrier, je vous prie d’agréer l’expression de mes sentiments les plus musicaux.
Joss,
chanteur dans le groupe lyonnais Home*Taping.”